Le juge d’instruction près la Cour de justice, Tarek Bitar, a de nouveau été dessaisi de l'enquête sur la double explosion au port de Beyrouth, après avoir été notifié d'un recours déposé par l'ancien ministre des Travaux publics et des Transports, Youssef Fenianos, auprès de la Chambre civile de la Cour d'appel de Beyrouth. M. Fenianos, proche des Marada de Sleiman Frangié, fait partie des responsables mis en cause dans le cadre de cette affaire. Ayant refusé de comparaître, il est sous un mandat d'arrêt resté sans exécution.
Cible d'une campagne de dénigrement orchestrée depuis des semaines par le Hezbollah et ses alliés qui demandent sa récusation, c'est la troisième fois que Tarek Bitar se retrouve contraint de suspendre l'enquête. Les politiciens tentent en effet par tous les moyens d'entraver le travail du juge, refusant de comparaître, multipliant les plaintes devant la justice à son encontre, ou appelant à son remplacement. Les politiciens mis en cause ont déposé quinze plaintes au total contre le juge Bitar pour entraver l'enquête, selon une source judiciaire à l'AFP, le forçant déjà auparavant à suspendre ses investigations à deux reprises en septembre puis en octobre.
L'affaire paralyse le gouvernement, qui ne s'est plus réuni depuis trois semaines en raison des exigences du Hezbollah et de son allié Amal, le dossier suscitant de vives tensions et divisions au Liban. Cette polarisation a dégénéré en violences meurtrières le 14 octobre à Beyrouth après des tirs en marge d'une manifestation organisée par le Hezbollah et son allié, le mouvement Amal, pour exiger le remplacement du juge. Les violences qui ont dégénéré en affrontements avec des éléments armés vraisemblablement proches des Forces libanaises de Samir Geagea ont fait sept morts.
Le premier juge chargé de l'affaire, Fadi Sawan, a été écarté en février après avoir inculpé de hauts responsables, et le magistrat Bitar est soumis à des pressions et à des menaces depuis qu'il l'a remplacé. Il fait également face à des obstructions, notamment le refus du Parlement de lever l'immunité de certains de ses membres soupçonnés d'être impliqués dans le dossier.
Les dirigeants libanais se sont opposés à une enquête internationale sur l'explosion du 4 août 2020 qui a fait plus de 210 morts et dévasté des quartiers entiers de la capitale. L'énorme déflagration au port a été déclenchée par un incendie dans un entrepôt qui abritait des tonnes de nitrate d'ammonium stockées "sans mesures de précaution", de l'aveu même des autorités qui sont accusées de "négligence criminelle".
commentaires (18)
Essayons de deviner qui en veut à Tarek Bitar. Hizbollah et Israël. Ce n'est dans l'intérêt de ni l'un ni l'autre de dévoiler la vérité de ce jour tragique, le 4 aout 2020. Les pays occidentaux le savent eux, puisqu'ils refusent de livrer les photos des satellites sous prétexte qu'il n'y a rien a voir!
CW
06 h 47, le 06 novembre 2021