Des propos virulents du patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, à l'encontre du Hezbollah qu'il accuse de "confisquer la décision de guerre et de paix" au Liban ont circulé jeudi dans les médias et sur les réseaux sociaux. Dans ces déclarations, reprises dans un extrait vidéo, le patriarche s'adresse au parti chiite en lui reprochant de ne prendre en compte "ni notre intérêt ni celui de votre base". Ces critiques interviennent alors qu'un dialogue entre le patriarcat maronite et la formation dirigée par Hassan Nasrallah est en cours du fait de divergences autour de questions stratégiques. En effet, le chef de l'Eglise maronite prône sans cesse la neutralité du Liban et appelle à la tenue d'une conférence internationale sous l'égide de l'ONU pour se pencher sur un Liban embourbée dans la pire crise socio-économique de ses trente dernières années. Ces appels du patriarche ont irrité fortement le Hezbollah et dans un de ses discours, Hassan Nasrallah les avait assimilés à "une déclaration de guerre".
L'extrait vidéo ayant circulé dans les médias locaux est tiré de l'enregistrement d'une visioconférence qu'a tenue samedi dernier le patriarche avec des membres de la diaspora, organisée par les paroisses Saint-Maron de Brooklyn et Notre-Dame du Liban de Los Angeles, disponible dans son intégralité en ligne. La partie fuitée se trouve vers la 49e minute.
"Pourquoi êtes-vous contre la neutralité ? Voulez-vous nous obliger à entrer en guerre ?, lance le patriarche dans cette vidéo massivement partagée sur les réseaux sociaux dans la nuit de mercredi à jeudi. Pourquoi refusez-vous une initiative de neutralité qui est dans votre intérêt et dans celui de tous les Libanais et ouvre la voie à la prospérité ; Pourquoi décidez-vous de plonger le Liban dans une guerre que vous avez vous-mêmes décidé de mener ?" "Avez-vous pris l'avis et l'approbation des Libanais avant de vous impliquer en Syrie, en Irak et au Yémen ? Avez-vous pris l'avis du gouvernement avant de décider de la guerre ou de la paix avec Israël ?", a encore déclaré le prélat, rappelant que, selon la Constitution, ces décisions doivent être prises par le gouvernement, à la majorité des deux tiers. "Ce que je fais (en prônant la neutralité, ndlr), je le fais dans votre intérêt, mais vous, vous ne prenez en compte ni notre intérêt ni celui de votre base", a-t-il encore affirmé. Et de souligner avoir entendu des partisans du Hezbollah lui confier que les armes du parti chiite sont "contre eux" et qu'ils ne "peuvent plus supporter" cette situation et qu'ils "ont faim" comme le reste du peuple libanais. Le prélat rappelle qu'il a appelé à plusieurs reprises le parti chiite à discuter du concept de neutralité, sans avoir jusque-là obtenu de réponse.
Le 27 février, lors d'un grand rassemblement organisé à Bkerké pour soutenir les appels du patriarche à la neutralité du Liban et à la tenue d'une conférence internationale sous les auspices de l'ONU pour un règlement de la crise libanaise, le patriarche avait appelé à la "libération de l'Etat", maintenant que "le territoire a été libéré". Après cette charge contre le Hezbollah et ses armes, le dialogue avait quand même repris entre les deux parties, via un comité bipartite. Ce groupe s'était réuni le 8 mars et avait, selon un communiqué du parti chiite, évoqué "la question de la neutralité positive proposée par le patriarche Raï". Le Hezbollah estime que le Liban ne peut être neutre au vu des "menaces" israéliennes et estime qu'une internationalisation du règlement des crises multiples que traverse le pays équivaut à une "déclaration de guerre".
commentaires (9)
Le Rai a pointe du doigt la potentielle solution qui s'annonce ... La guerre. Il ne la veut surement pas, mais les actions et la présence du Hezbollah en tant que milice pousse vers une telle solution. Pourquoi la guerre serait elle la seule solution? D'abord car le Hezbollah a commit plein de crimes et sait très bien que déposer les armes est synonyme de condamnations et de scandales qui vont ressortir a la surface et que sont projet de Wali el Fakih est mort et enterré. Il ne lâchera que s'il est défait est démantelé. Le Liban a atteint un tel degré de corruption que sans une guerre, aucun gouvernement quel qu'il soit ne pourra changer les faits sur le terrain. Pour pouvoir le faire, il faut que la justice puisse appliquer les lois sans peur de représailles par une milice mafieuse. L’état doit limoger plus de 50% de ses employés puisqu'ils sont soit incapables soit inutiles. Quel gouvernement avec les énergumènes d'aujourd'hui le pourra-t-il? Surement pas puisqu'ils sont eux même a juger pour corruption. Que Dieu aide le pays.
Pierre Hadjigeorgiou
14 h 10, le 02 avril 2021