Selon un ancien responsable, en dépit des allées et venues actuelles, rien n'indique que le dossier présidentiel libanais est appelé à bouger. Selon lui, cela est dû, d'une part, à l'incapacité des Libanais à s'entendre, et, d'autre part, au fait que l'heure des grandes solutions n'a pas encore sonné. Ce qui signifie que si l'Occident tient à la stabilité du Liban, il ne va pas jusqu'à se soucier de lui trouver un président. En même temps, toutes les tentatives pour « libaniser » cette échéance ont échoué, face au refus des parties concernées de faire la moindre concession.
Un élément nouveau est intervenu récemment et a compliqué encore plus la situation, c'est la volonté de certaines parties de lier l'échéance présidentielle libanaise aux dossiers régionaux et de l'utiliser comme carte de pression dans d'autres dossiers régionaux. C'est à cause de ce développement que le responsable de la section Afrique-Moyen-Orient au Quai d'Orsay Jean François Giraud a reporté la visite qu'il comptait effectuer prochainement à Beyrouth. Chargé de tenter de débloquer le dossier présidentiel libanais, Giraud guettait en fait des signaux positifs de la part de l'Iran qu'il a visité plusieurs fois, mais ils ne sont pas venus. En même temps, la mort du roi Abdallah d'Arabie et l'arrivée au pouvoir de son frère Salmane avec une nouvelle équipe vont retarder encore l'examen du dossier libanais car les nouveaux piliers du pouvoir à Riyad ont besoin de temps pour consulter les dossiers les plus importants, avant d'arriver jusqu'au dossier libanais. Tout ce qu'ont pu obtenir les Libanais qui ont été présenter leurs condoléances à Riyad au nouveau roi, c'est la promesse de poursuivre sur la voie tracée par le roi Abdallah. À Nabih Berry qui disait au roi Salmane que le Liban était dans le cœur de son prédécesseur, celui-ci a répondu : « Inchallah nous en ferons de même. » Pour certains, c'est la preuve qu'il n'y aura aucun changement dans la politique saoudienne à l'égard du Liban, celle-ci étant depuis des décennies basée sur des constantes qui ne dépendent pas des personnes au pouvoir.
De toute façon, estiment les milieux politiques, le changement de roi à Riyad ne changera rien à l'impasse présidentielle libanaise actuelle car le blocage ne vient pas de l'Arabie saoudite. Il vient des députés qui refusent de se rendre au Parlement pour la séance d'élection et invoquent pour cela des excuses bien peu convaincantes.
Face à ce constat, le double dialogue interne actuellement en cours entre, d'une part, le Hezbollah et le courant du Futur, et, d'autre part, les Forces libanaises et le CPL, ne semble pas de nature à aboutir à un déblocage du dossier présidentiel. Preuve en est que, jusqu'à présent, le Hezbollah continue de soutenir la candidature de Michel Aoun à la présidence. Les milieux du 14 Mars estiment que cette position du Hezbollah est dictée par l'Iran.
De son côté, le général Aoun refuse de renoncer à sa candidature, estimant que c'est son droit et sa chance. Il se pose en candidat d'entente puisqu'il a noué un dialogue avec toutes les parties internes, y compris les plus hostiles à sa candidature, les Forces libanaises. Aoun se fait d'ailleurs fort de convaincre celles-ci d'appuyer sa candidature sur la base de l'idée d'un candidat fort qui rétablisse l'équilibre perdu entre les composantes de la société libanaise. Aoun propose d'élire « le plus représentatif des chrétiens », tout comme le président de la Chambre est l'homme fort des chiites et le Premier ministre est l'homme fort des sunnites. Il croit pouvoir convaincre Samir Geagea de cette idée car elle lui ouvre la route de la présidence.
Pour l'instant, rien n'indique que Samir Geagea est sur le point d'être convaincu de cette théorie. Son conseiller Melhem Riachi, chargé du dialogue avec le CPL, précise que le dossier présidentiel fait partie des sujets discutés, mais il se pourrait que les deux parties ne parviennent pas à s'entendre. L'essentiel, selon lui, est de gérer le conflit et de faire en sorte qu'il n'ait pas de conséquence sur la scène chrétienne. Selon Riachi, le plus important est de tourner la page détestable des relations sanglantes entre les Forces libanaises et le CPL. La réconciliation est impérative, mais elle ne signifiera pas que les deux parties seront d'accord sur tout.
Pour toutes ces raisons, le Liban n'est pas près d'avoir un président dans un proche avenir. Ce dossier devra donc attendre les règlements régionaux et internationaux, avec une possibilité toutefois que le Liban devienne un moyen de tester les intentions de l'Iran et de l'Arabie saoudite. Si ces deux pays parviennent à s'entendre au Liban, peut-être que cela pourra servir d'exemple et de modèle à suivre dans d'autres dossiers. D'où l'importance du dialogue entre le Hezbollah et le courant du Futur.
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commentaires (2)
PLUTÔT POUR LES PERC(S)ÉES... LA SAOUDITE N'AYANT JAMAIS EU DES VISÉES HÉGÉMONIQUES AU LIBAN... NI DES BASES MILITAIRES !!!
LA LIBRE EXPRESSION
09 h 50, le 27 janvier 2015